Utiliser les langues congolaises dans la construction de la pensée, dans l’enseignement, dans la transmission des connaissances, dans les institutions de l’Etat, demeure une préoccupation du professeur Bienvenue Sene Mongaba depuis des années. Détenteur d’une thèse écrite entièrement en Lingala, le prof. Mongaba écrit des ouvrages, des manuels scolaires, traduit des documents dans les langues nationales et congolaises.
Dans une interview à actualité.cd, le prof. Mongaba affirme que la construction de la pensée et la transmission des savoirs se feraient mieux en langues congolaises.
«Je voudrais qu’on utilise pas seulement les langues nationales mais les langues congolaises pour construire la pensée, s’approprier le savoir et s’épanouir. Toutes ces langues constituent l’unité nationale. On doit enseigner et écrire des livres en Kingwandi, en Kiyaka, en Kiyavu, en Kikongo, en Lingala. Parce que nous devons construire ce pays, il se construit avec les savoirs, les connaissances. Comment construire un pays quand le peuple n’a pas la maîtrise de la langue?», s’interroge-t-il.
Pour lui, si on permettait notamment aux députés de proposer des lois, de défendre leurs circonscriptions dans leurs langues, on aurait eu plus de résultats.
«Je suis congolais, ma langue c’est le Lingala et le Kitshini. C’était pour moi normal que je lise des livres écrits dans ma langue, mais je ne trouvais pas, il n’y en avait pas assez, non plus, écrit en Lingala. C’est quelque chose de basique, on vit dans un pays où on utilise une langue étrangère pour la pensée, comment peut-on construire la pensée avec une langue qu’on ne maîtrise pas? Et on voit les conséquences dramatiques que nous avons aujourd’hui», a-t-il ajouté.
Il propose également la traduction de plusieurs documents officiels, entre autres, l’hymne national, la constitution et bien d’autres textes et lois du pays. M. Sene Mongaba a écrit un dictionnaire des 4 langues nationales plus le français et l’anglais. Il affirme que c’est pour montrer que l’unité nationale peut être construite avec nos langues et nos peuples. Plus nous écrivons dans nos langues, dit-il, plus nous nous rendons compte que nous ne sommes pas si différents.
Il est à la tête des éditions Mabiki, une maison d’édition qui met un accent particulier dans l’édition des ouvrages en langues congolaises. Pour Sene, le français ne fait pas partie des langues africaines.
«Le français n’est pas une langue africaine. Si c’était notre langue, pourquoi les mots que nous créons doivent être d’abord acceptés par l’académie française à Paris? Quand nous créons des mots en Lingala, on ne demande à personne pour leur acceptation. Mais quand il s’agit du français, il faut demander à Paris», a-t-il dit.
Le professeur Bienvenue Sene Mongaba détient une école dans la commune de Kimbanseke, dans la partie Est de la province de Kinshasa, qui donne des enseignements bilingues, en Lingala et en français. Il a traduit en lingala, le tableau périodique des éléments chimiques, il a écrit des livres de chimie d’école secondaire en Lingala et il vient de finir récemment l’écriture des livres de Mathématiques d’école primaire en Lingala.
Le Congo compte 4 langues nationales et plus de 200 autres langues à côté, réparties par peuple. Mais la loi cadre de l’enseignement de 1986 reconnaissait la langue française et les langues congolaises comme langues d’enseignement avant que celle de 2014 recule en stipulant que la langue française est celle de l’enseignement et que les langues congolaises sont les langues d’appui à l’enseignement.
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